Catégories
Ironique et Sarcastique L'art de rentrer dans le lard du sujet Les essais de Pascal Rivière

La vieille rouée des mauvais coups

Quand la manipulation devient un art théâtral puis musical

Publié le 4 mars 2025

Chers lecteurs,

Aujourd’hui, je souhaite partager avec vous une création littéraire née d’une expérience que beaucoup d’entre vous reconnaîtront peut-être : les manipulations d’un parent âgé qui, tel un instrument de musique bien accordé, sait jouer des émotions de son entourage.

Ce texte est d’abord né d’un besoin cathartique de « vider mon sac » face aux récentes manœuvres d’une mère vieillissante qui excelle dans l’art de la manipulation émotionnelle. J’ai ensuite eu envie de donner à ce texte le panache d’un Cyrano de Bergerac, transformant ma frustration en une tirade digne d’Edmond Rostand.

Le résultat est cette complainte lyrique qui joue sur les multiples sens des mots « vielle » (l’instrument de musique à roue), « vieille » (la personne âgée) et « rouée » (la personne rusée, manipulatrice). La métaphore filée de la vielle à roue, cet instrument traditionnel dont on tourne la manivelle pour faire vibrer les cordes, m’a semblé parfaitement illustrer comment cette « chère maman » joue des cordes sensibles de son entourage.

Le texte original : La Symphonie de la Rouée à Roue

Une complainte Cyrano-esque d’un fils

La voilà ! Souveraine en son fauteuil-royaume,
Vieille à roue humaine aux mécanismes éprouvés,
Rouée de tous les mauvais tours que sa roue perpétue,
Ses rouages menteurs tournant sans jamais s’enrayer !

Ses yeux, poignards acérés, scrutent les âmes à berner,
Son sourire, archet aiguisé, frôle les consciences fragiles,
Tandis que sa main ridée fait tourner la roue de nos tourments
Comme une rouée vielleuse experte en tromperies circulaires !

Cette vielle dame est vielle musicienne des émotions d’autrui !
Rouée comme pas une dans l’art de faire tourner les têtes,
Sa caisse de résonance amplifie les moindres drames,
Et sa roue grinçante fait vibrer les cordes de nos culpabilités !

Elle tourne sa manivelle avec la ruse d’une rouée experte,
Produisant cette musique lancinante de mensonges brodés,
De flatteries enroulées autour de l’axe de sa roue trompeuse,
Et de drames montés en épingle, tournant en boucle perpétuelle !

En virtuose de sa vielle, en rouée des sentiments,
Elle sait quand ralentir le tempo de ses larmes feintes,
Quand accélérer le rythme des rires calculés,
Quand faire tourner la roue de ses soupirs mensongers,
Feignant l’épuisement d’une sainte femme
Dont les rouages seraient usés par trop de manigances !

« Ah ! Si vous connaissiez tous les tours que ma roue a joués pour vous ! »
Soupire-t-elle, voix vibrante comme une rouée prise en flagrant délit !
Et autour, on danse à sa musique, prisonniers de sa roue infernale,
On s’excuse en cadence, on obéit au cercle vicieux qu’elle impose !

Elle tourne, elle tourne, infatigable vielle à roue des manipulations !
Rouée comme pas une dans l’art de nous faire tourner en bourrique !
Chacun croit diriger l’orchestre de ses humeurs,
Mais c’est elle, la rouée, qui tient la roue de nos émotions !
Les naïfs pensent que sa mélodie tourne en rond par fatigue,
Mais c’est le manège savamment orchestré d’une rouée qui nous envoûte !

Madame, par tous les saints menteurs, manipule mon cœur tourmenté !
Sa vielle à roue détourne les richesses de son patrimoine,
Vendant les bibelots qui ornaient la roue de sa fortune,
Pour financer ces charlatans qui font tourner la roue de ses illusions !

Elle compose des fables d’avocats consultés, de services sociaux alertés,
Sans jamais préciser quelle roue du destin l’a menée
À ces consultations mystiques où tournent les rouages de l’escroquerie !
Ah, ces voyants aux numéros surtaxés,
Gouffres abyssaux où son argent s’évapore
Dans le vortex d’une roue qui tourne à vide !

Son téléphone à recharges, rouage essentiel de ses mensonges,
Voit son crédit s’épuiser en quelques tours de cadran,
Victime des tours pendables que cette rouée lui fait jouer !

Il faudrait plaindre cette vielle dame aux rouages détraqués !

Ô comble de l’ironie mécanique ! Pour faire tourner la roue des manipulations,
Cette rouée retrouve la dextérité d’une horlogère suisse !
Mais lorsqu’il s’agit de faire tourner un simple bouton,
Sa roue s’enraye soudain sous ses doigts prétendument malhabiles !

Sa télévision, nouveau rouage dans sa mécanique domestique,
Reste figée, non par défaut de fabrication,
Mais parce que la rouée n’a pas appris
À faire tourner ce bouton sans y trouver son intérêt !

Elle m’appelle, sa voix plaintive comme une roue mal graissée,
Harcèle son aide familiale, autre victime de ses tours pendables,
Mais en définitive, c’est toujours pour faire tourner la roue de quelque nouvelle duperie !
Elle nous prend, l’un et l’autre, pour des engrenages dociles
Dans la grande roue de ses mensonges !

Un jour pourtant, la roue de la rouée grincera une dernière fois !
L’engrenage de ses fourberies s’enrayera dans un fracas de vérité !
La mélodie menteuse déraillera comme une roue qui se brise !
Mais d’ici là, elle continue de tourner sa manivelle usée,
De jouer ses tours, de faire tourner la tête à son auditoire crédule.
Car après tout, pourquoi la rouée cesserait-elle de faire tourner sa roue
Quand tout le monde tourne encore autour d’elle ?

Puis la version chantée : La Vieille Rouée des Mauvais Coups

Cette complainte m’a ensuite inspiré une gigue folklorique humoristique, que vous pourriez fredonner la prochaine fois que vous vous retrouverez face à un manipulateur ou une manipulatrice…

(À chanter sur un rythme enlevé)

Refrain :
Tournez, tournez, la vieille à roue
Ses ficelles et ses manigances
Tournez, tournez, jusqu’au bout
Tout l’monde suit sa cadence !

La vieille dame dans son fauteuil,
Qui fait les yeux de carpe en deuil,
Tourne sa vielle, tourne ses ruses,
Jamais à court d’une excuse !
(Hardi les gars, tapez du pied !)

Pour les voyants, pour les gourous,
Elle vend ses bibelots, ses bijoux,
Puis téléphone d’un air plaintif :
« Venez m’aider, je suis captive ! »
(Allez, frappez dans vos mains !)

Refrain

Sa télé neuve ne marche pas,
Mais c’est qu’elle n’appuie pas du bon doigt !
Pour les magouilles, elle est savante,
Pour les boutons, elle est mourante !
(Tournez, danseurs, tournez en rond !)

Elle joue de nous comme de sa vielle,
Serrant la vis, tournant la manivelle,
Rouée comme dix, rusée comme trente,
Sa mélodie est ensorcelante !
(Hop là ! Un pas chassé à droite !)

Refrain

L’aide-ménagère en perd la tête,
Son fils aussi devient tout bête,
À force de danser comme des fous
Sur l’air joué par la vieille à roue !
(Sautez, virez, c’est la gigue !)

Un jour pourtant la roue grincera,
Le mécanisme s’enrayera,
Et nous verrons la vielle dame
Prise au piège de son propre drame !
(Et clap, et clap, frappez des mains !)

Refrain final :
Tournez, tournez, la vieille à roue
Ses ficelles et ses manigances
Tournez, tournez, c’est le grand coup
La roue tourne… et c’est la fin de la danse !


Cette création est née d’un moment d’exaspération et d’un besoin de sublimer la frustration en art. Si vous aussi vous avez affaire à un proche manipulateur, peut-être que l’humour et la créativité pourront vous aider à prendre du recul. N’hésitez pas à partager en commentaires vos propres expériences ou créations inspirées par les « vieilles rouées » qui peuplent vos vies !

À bientôt pour de nouvelles chroniques,

P Rivière