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La Fourmi et la Cigale

Ah, le Midi en été, ce théâtre où se jouent les rôles éternels de la Cigale et de la Fourmi, revisités à la sauce touristique. Imaginez un instant ce tableau digne d’un humoriste en goguette.
D’un côté, les fourmis. Ces touristes frénétiques, cartes en main, chapeaux de paille vissés sur le crâne, suant à grosses gouttes. Ils s’entassent sur les plages brûlantes, se ruent vers les piscines surpeuplées, se pressent aux caisses des grands magasins, et se faufilent entre les ruelles comme des insectes dérangés. C’est une danse désordonnée, un ballet cacophonique où chacun se débat pour gratter un morceau de soleil, un peu de mer ou un souvenir en plastique. La plage devient leur fourmilière, la piscine leur oasis illusoire.
Pendant ce temps, à l’écart de cette agitation, il y a les cigales. Ah, les cigales ! Ces êtres subtils, intelligents, qui ont compris l’art de vivre sans se perdre dans le brouhaha touristique. À l’ombre des oliviers, loin des foules, ils chantent doucement, sirotent un verre de pastis et savourent la douce torpeur de l’été. La chaleur ne les dérange pas, car ils savent où trouver la fraîcheur sans avoir à la chercher. Ils se reposent, ils philosophent, ils se la coulent douce, ces épicuriens. Pendant que les fourmis s’éreintent, les cigales contemplent le monde avec un sourire en coin, savourant le spectacle de cette humanité désordonnée.
Et l’on se souvient de La Fontaine, bien sûr. Mais ici, la fable est renversée. La cigale a chanté tout l’été et continue de le faire, paisible, sereine, tandis que la fourmi, en vacances, se débat dans son propre chaos. Elle n’a jamais appris à profiter du moment, toujours à courir, toujours à chercher, sans jamais trouver le repos. Si La Fontaine voyait cela, il en perdrait ses vers. Il y a une morale, pourtant : à quoi bon s’agiter comme une fourmi en été, quand on peut se poser et chanter comme une cigale ?
Ainsi, chers touristes, apprenez des cigales. L’été n’est pas une course, mais une pause. Un moment pour ralentir, pour sentir le parfum des pins, pour écouter le chant des insectes, pour vivre simplement. Car la vraie richesse n’est pas dans la frénésie, mais dans la tranquillité de l’instant présent.